mercredi 29 février 2012

fin d'après-midi
derrière la baie vitrée
les arbres en feu

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Magyar's translation :

Looking through the bay window, 
the trees afire


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Iris' translation :

flames
ready to burn
hot evening

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afternoon's end
behind the bay-window
the trees afire

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le rouge domine
dans le ciel embrasé
les ombres s'allongent


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Les arbres flambent
dans le brasier
de la fin du jour

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Une traduction en polonais d'un de mes haïku, par Agnieszka :

noces de laine
les premières mites
dans l'armoire


wełniane gody ̶
pierwsze mole
w szafie



Merci Agnieszka ! 

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de retour
sur sa veste 
la fraîcheur du printemps

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jour lumineux
les fûts des arbres
s'allongent 

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elle me dit
au téléphone :
l'air change

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il vient de pleuvoir
les arbres
s'épongent

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lundi 27 février 2012

ciel pur
sur la place un homme
dépèce des lottes

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jours plus longs
un vieillard remonte la rue
à pas serrés

soleil au déclin
derrière les peupliers
l'éclat d'un faisan

dans le soir
le bruit incessant des vagues
quel travail !

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chaleur solaire
au pied du bouleau
des punaises
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le soleil tourne
en rond et
fait des vagues

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dimanche 26 février 2012

pas distraits
sur les myosotis en fleur
au loin l'ambulance

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Z

minuscules
les feuilles de l'albizia
le corbeau  s'éloigne


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sur l'île de Ré
les myosotis en fleur
à Montréal, la neige


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Z


Zorro
reste zen
du ciné


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cold wind
through the branches
more buds day by day


vent froid
sur les branches des bourgeons
plus nombreux chaque jour 

(trad. Danièle) 

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samedi 25 février 2012

Le haïku, enfantin ?
Réflexion 



Le haïku, par sa simplicité, peut être considéré d'un certain point de vue peu profond et bien enfantin. Mais ce serait négliger toute la part de non-dit qu'il renferme.
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Il y a les mots et tout ce qui est dit entre les mots, dans les silences, les blancs, les symboles.


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Rien d'enfantin, dans le sens de " facile ". Il faut justement cette " âme d'enfant " pour sortir une observation juste et spontanée. C'est tellement facile que je détruis 90 % de mes productions, car je reste non satisfait de celles-là.

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Le jeune enfant ne fait pas d'efforts car sa tête n'est pas encore encombrée de tous ces "savoirs" qui modifient notre perception.

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Tout dépend de ce qu'on entend par "enfantin". Quoique le dictionnaire (un dictionnaire ! j'ai consulté internaute.com, dictionnaire de la langue française.)nous offre deux définitions

1. propre à l'enfant.
2. élémentaire, facile, puéril, simple. ),

le terme est souvent utilisé de façon péjorative. Il va de soi qu'aucun visiteur de ton blogue ne viendra défendre ici l'idée que le haïku est puéril (sinon, qu'est-ce qu'il fait là ??). Ni probablement l'idée que c'est "simple". Parce que la plupart de nous passent beaucoup de temps et mettent beaucoup d'effort à "améliorer" leurs haïkus.

Quoique... j'ai l'impression que nos meilleurs haïkus sont ceux qui nous ont été "donnés", c'est à dire, qu'on n'a pas "travaillé" mais qui se sont tout simplement écrits par eux-mêmes, à travers notre crayon. C'est cette simplicité, ce regard tout neuf sur le monde qui nous entoure, ce que Francine Chicoine appelle (je crois) "premier regard", comme le regard de l'enfant, qui fait souvent qu'un haïku nous émeut*.
En ce sens-là, on peut dire que le haïku est un art qui vient facilement aux enfants. Et nous avons tout intérêt à "redevenir des enfants" devant le monde.

*(D'ailleurs, c'est tout ce que je demande à un haïku : qu'il me touche profondément, qu'il déclenche une émotion - tout en respectant les caractéristiques du genre littéraire.)

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Devant l'éclair -
sublime est celui
qui ne sait rien !

Bashô, trad. Atlan


Savoir porter sur le monde un regard neuf est effectivement essentiel pour le haïjin. Et ce regard - propre à l''enfant - ce "regard poétique" en quelque sorte, ne constitue-t-il la difficulté majeure ? Sans lui, impossible d'émouvoir le lecteur et toutes les règles du genre n'y feront rien.
L'autre dimension du haïku se situe au-delà des mots, au-delà du dire. Certes, il peut n'être que contemplatif mais, même dans ce cas, il ne dit pas tout à fait tout ou alors il est raté.
Relisant les Anciens, je suis souvent frappée par la portée de leurs haïku, le pouvoir suggestif des mots et des silences, des couleurs, des contrastes, du rythme ...

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En effet, ce regard neuf sur le monde est tout sauf simple pour les adultes que nous sommes. Il s'agit probablement d'arriver à dépasser le simple "regarder" pour... voir ! Pour ça, il faut se décentrer de soi - on touche ici peut-être à la fameuse "objectivité" du haïku. En même temps, ce "premier regard" qu'on peut apprendre de l'enfant est quelque chose d'éminemment subjectif !

La deuxième dimension que tu mentionnes est ce qu'on appelle dans le jargon des haïkistes "le non-dit". Il faut en effet en laisser un peu au lecteur, le prendre pour quelqu'un qui est capable de co-construire le sens de ce que le haïku suggère.

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Tout l'art réside dans le "savoir-doser" cet implicite. Le non-dit oui, mais avec beaucoup de doigté.

Après l'attentat
fusil-mitrailleur d'enfant
parmi les décombres

Salim Bellen, "L'échelle brisée", AFH 2007

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  1. Mon regard sur un haïku n'est pas si intellectuel que les vôtres, et ma perception reste tout simplement enfantine. Je dois dire que je lis et perçois comme un enfant qui découvre dans son imaginaire cette peinture écrite.
    Par_contre pour l'auteur. Chaque mot apporte sa valeur, sa densité et la composition finale en fait une œuvre. La perfection, est de reproduire en si peu de mots sa propre perception et la transmettre d'une façon aussi parfaite. Donc, il n'est pas enfantin d'écrire un haïku dans le sens de l'art, le poète doit avoir cette maîtrise de la langue pour réussir sa composition

  2. **
    Il existe bien des formes de haïku et une perception "simplement enfantine" constitue déjà un grand art qui oblige à retrouver un état de "vacuité originelle", la meilleure manière de parvenir à la disponibilité intellectuelle.
    Shiki (à qui l'on doit le nom "haïku" donné à ce petit poème)était partisan d'un style simple et prônait le croquis sur le vif. Pour lui, le haïjin doit savoir se débarrasser des oripeaux qui l'encombrent pour être en mesure de saisir l'essence du monde naturel :

    Devant la maison vide
    une cigale crépite
    au dernier soleil

    (trad. Atlan)

    ** 



    Il y a peu que je m'intéresse aux haïkus, à cette forme poétique,- sans doute parce qu'elle me semblait être à la mode et que je fuis ce qui est "tendance" comme on dit je crois.
    Mais peu à peu, cette forme si épurée du langage m'a séduite, cette "apparente simplicité" dont je parlais pour Octavio Paz. Rien d'enfantin bien sûr, mais un grand art minimaliste, précis et suggestif à la fois.
    IL y a peu je visitais la fondation Joan Miró ici à Palma, et je pensais la même chose à propos de certaines de ses peintures et sculptures aussi: ça a l'air si simple, formes et couleurs primaires, et pourtant...

    **


    Oui, ce serait - pour moi - un beau haïku (je cite O. Paz) :


    la femme
    par mes yeux

     **






    1. Octavio Paz est sublime.

    2. **



      Je ressens parfois la même impression d'effet de mode. En même temps, je pense que le haïku plaît vraiment pour sa concision qui permet de l'écrire relativement vite, de l'échanger facilement, de dire beaucoup en peu de mots ; ce détachement de soi qu'il exige et le regard neuf qu'il invite à porter sur le monde ; l'humilité qu'il réclame : il ne faut pas craindre l'autodérision et admettre la petitesse de l'être humain pas plus important en ce monde qu'un brin d'herbe ou un minuscule insecte... un passager bien fragile voué à la disparition.
      Le haïku a aussi cela de magnifique qu'il rassemble : lors d'un kukaï, les haïjin échangent et confrontent leurs poèmes en toute modestie. Il n'est pas toujours facile d'ailleurs d'admettre la critique mais c'est la règle du jeu.
      Je crois aussi qu'en cette époque difficile il représente une belle bouffée d'oxygène pour beaucoup.
      Bien sûr, de nombreux haïku s'écrivent : peu sans doute sont vraiment de qualité. Il n'est pas rare cependant d'en trouver d'admirables qu'on aimerait avoir écrits.
      Tu fais un rapprochement avec les peintures et sculptures de Joan Miro. C'est vrai que parfois, à propos de lui, Breton évoquait un art "enfantin", tout en sachant bien sûr que cet art était du grand art. Car qui plus que Miro a su féconder l'imagination et l'imaginaire en allant l'air de rien bien au-delà de l'objet visuel ?

    **



    Le Haïku est un art difficile, très difficile même. Il y faut une telle concision dans cette expression poétique que sa simplicité n'est qu'apparente. Adopté par les maitres du zen car en quelques mots, l'âme doit être atteinte. Si tel n'est pas le cas, alors le moine zen saura que le lecteur n'aura fait que passer et qu'il n'était pas encore prêt à "sentir" un message qui se dénaturerait probablement dans une trop longue diatribe...

    **


    Haiku's most powerful moments seem to originate in the "beginner's mind." Is that the same as "enfantin?"

    **

jeudi 23 février 2012

 Question

Le haïku, c'est enfantin !
Enfantin... vraiment ?

Merci de répondre à cette question si elle vous inspire.  
Même en Anglais, si vous le souhaitez.
Je suis en train de réfléchir sur ce sujet.


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midi sous la bruine 
le héron déploie ses ailes 
couleur du temps

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l'eau scintille
un cormoran solitaire
déglutit trois fois


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mercredi 22 février 2012

 



Editions L'iroli, mars 2012


"Trois poètes du haïku francophone nous offrent leurs accents, leurs parfums mêlés, la fine observation de leurs continents naturels... Un même souffle humain universel traverse ces textes".


lune gibbeuse 
l'éclat du chêne nu 
elle et moi voyeuses

Janick Belleau


plage érodée 
en haut de la falaise un pin 
au bord du vide

Danièle Duteil


tourbillon de vent 
la citronnelle m’enveloppe 
de son parfum

Monique Mérabet

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